vendredi 16 décembre 2011

Blue Velvet est sorti en 1986. Je me souviens l'avoir loué, sur les conseils de mon père, et regardé avec lui. La date exacte m'échappe, mais ça devait être l'année suivante. A l'époque, les films étaient disponibles (en VHS ...) douze mois après la projection salle, pas trois mois avant, comme c'est le cas aujourd'hui grâce à internet. J'avais déjà vu un film de Lynch en 1984, Dune, mais je n'avais pas encore pris conscience que deux films pouvaient avoir été réalisés par le même bonhomme. En revanche, j'avais constaté avec enchantement, en allant voir Indiana Jones et le temple maudit, que Yan Solo (il était Breton en ce temps-là) jouait aussi ... Indiana Jones ! Et là, le cinéma a commencé à prendre du sens dans ma vie. Bref, au premier visionnage de Blue Velvet, j'avais donc neuf ou dix ans et le film m'a durablement traumatisé. Notamment la scène de sadomasochisme entre Denis Hopper, respirant sa bonbonne d'oxygène, et Isabella Rossellini. En plus de ça, je le trouvais horriblement lent.

Puis le temps a fait son oeuvre. J'ai appris à maîtriser le concept de "réalisateur de film", je me suis fait mon premier cinéma tout seul (il y en a eu plein depuis, d'ailleurs ...) - c'était Rambo 3, mais j'avais dit à mes parents que j'allais voir L'Ours (que je n'ai vu qu'à 26 ans et trouvé moins bon que Rambo 3, j'avais eu un bon pressentiment ...). J'ai retrouvé Lynch à maintes reprises. Pour Sailor & Lula, Twin Peaks, une rediffusion d'Eraserhead (que j'ai trouvé terriblement prétentieux, mais plus maintenant) et Lost Highway. Aaah ! Lost Highway ... Les années fac. Un film rock'n'roll (Bowie, Rammstein, Marilyn Manson ...) et hermétique (il est schizo Bill Pullman ou pas ?). Un chef d'oeuvre, en somme. Le film que, de toutes façons, tout le monde respectait. Pendant ce temps, Blue Velvet restait remisé dans un coin du grenier. Comme Woody face à Buzz l'Eclair, mais un Woody qu'on n'aurait jamais vraiment aimé. Trop bizarre, ce cowboy ! Bien sûr, sans l'avoir revu depuis, je lui avais accordé une revalorisation de conversations : "Blue Velvet ? Ouais, sûr j'l'ai vu. Bah, il est bien, mais bon ... c'est pas Lost Highway, quoi."

Puis le temps a fait son oeuvre. La barbe a poussé. J'ai vu encore plus de films, Lynch a commencé à m'emmerder et un jour, je suis retombé sur Blue Velvet, dans une solderie. Pour 2 euros, pourquoi pas. Je pose la galette dans le lecteur et là, je n'arrive plus à me décoller du canapé. Le choc ! Disparue la lenteur, l'ambiance malsaine prend une dimension poétique noire, la réalisation est d'une fluidité incroyable, la photo splendide ... Au bout de 120 minutes, tout ému, je remets le film dans son écrin de plastique et vais le placer fièrement sur l'étagère à côté des autres Lynch. Dune, Twin Peaks ... Tiens, pas Lost Highway. Il est au grenier.  




1 commentaire:

  1. excellent, du rôle trop ignoré des Cash Converter dans une cinéphilie assumée.

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