dimanche 6 novembre 2011

"Atypique", disait la jaquette

Double-programme épouvante hier soir, pour rester en accord avec la météo du weekend. Suis allé piocher dans la pile de DVD "en attente", dégotés à 0,50 centimes dans les solderies et j'ai enfin pris le temps de savourer Halloween III : Season of the Witch (1982) de Tommy Lee Wallace et The Terror (1963) de Roger Corman. 

Rien à redire sur le premier film, resté dans les annales de la franchise Halloween pour être le seul à ne pas faire intervenir son tueur emblématique Michael Myers. On notera que ce dernier apparaît malgré tout en photo, au dos de la jaquette, accompagné de l'accroche mensongère de l'éditeur : "Michael Myers ne tuera plus, il est guéri ... enfin presque !". Ce petit film, à la réalisation soignée (Wallace tournera plus tard Fright Night II et Ca, l'adaptation du roman de Stephen King ... rien d'impérissable en somme, mais rien de honteux), aux meurtres rares, mais sanglants, et à l'ambiance tendue, nous rappelle qu'à la fin des 70's et au début des 80's, on savait produire des séries B horrifiques bien troussées.      

Une semaine avant la fête d'Halloween. Le propriétaire d'une petite boutique de farces et attrapes, qui serre dans ses bras un masque en forme de citrouille, est admis dans un hôpital avant d'être violemment assassiné. Son meurtrier, un homme impassible vêtu d'un complet gris, regagne sa voiture et s'immole. Accompagné de la fille de la victime, le docteur Dan Challis mène l'enquête et se retrouve dans la petite ville de Santa Mira (lieu de l'action de L'Invasion des profanateurs de sépultures (1956) de Don Siegel, dont le héros est aussi un médecin. Petit hommage en passant), où les habitants semblent complètement dominés par la personnalité de Conal Cochran, le directeur de la fabrique de jouets Silver Shamrock ...

John Carpenter officie sur le projet en qualité de producteur et de compositeur (ce qu'il est depuis le premier opus, dont il a créé le thème musical incontournable). A l'époque, il souhaite faire d'Halloween une série de films aux histoires indépendantes, ayant pour seul point commun la fameuse nuit qui précède la Fête des Morts. Halloween III et son enquête sur une étrange fabrique de masques ouvre le bal, pour le clore aussitôt. L'échec du film va remettre à l'endroit la tête des investisseurs et Michael Myers de revenir ... et revenir ... et revenir encore, dans des productions à la qualité souvent douteuse, avant que deux remakes, réalisés par Rob Zombie en 2007 et 2009 (et sujets à polémique, mais c'est une autre histoire), ne viennent redynamiser ses aventures. 

Ajoutons enfin que l'intrigue d'Halloween III, qui mélange éléments scientifiques et occultisme ; les inquiétants "hommes en gris", chargés de veiller sur la fabrique de masques, et leur démarche d'automates ; le complot mis en place par un savant fou ... ne sont pas sans rappeler les aventures télévisuelles, puis cinématographiques, du professeur Quatermass. Et pour cause ! L'écriture du scénario a été confiée par Carpenter à Nigel Kneale, créateur de la série Quatermass pour la BBC, dont il admirait la qualité au point de signer certains de ses propres scénarios, celui de Prince des ténèbres notamment, du pseudonyme de Martin Quatermass. 



En comparaison, The Terror avec Boris Karloff (sur la fin) et Jack Nicholson (pas encore pourvu de son front légendaire) constitue un joli petit ovni foutraque, assez représentatif du bordel qu'a pu devenir la réalisation de certaines séries B des 60's. 

Produit par Roger Corman - l'homme qui a lancé Martin Scorsese, Denis Hopper, James Cameron, Robert De Niro, William Shatner et Patachou - ce dernier n'a filmé que les plans avec Karloff, et quelques plans complémentaires, en espérant leur donner un sens plus tard. On n'est pas si loin, toutes proportions gardées, d'une organisation à la Ed Wood, qui faisait tourner des prises sans queue ni tête, à un Bela Lugosi au bout du rouleau. A ce niveau, certaines scènes de The Terror donnent vraiment l'impression que Karloff, perdu dans une intrigue en roue libre, fait du mieux qu'il peut pour rester crédible.

La réalisation a ensuite été reprise par Francis Ford Coppola (originellement crédité comme "assistant de production"), Monte Hellman (futur réalisateur de Two-Lane Blacktop), Jack Hill (futur réalisateur de Foxy Brown avec Pam Grier et autres films de blaxploitation) et Jack Nicholson lui-même. Dans le genre équipe de prestige, on aura rarement vu mieux, mais pour quel résultat ... Avec un plan de travail inexistant, pas de moyens et un tournage fait à l'arrache, il est difficile d'aboutir à un chef d'oeuvre.   

Que retenir de cette histoire d'officier de l'armée napoléonienne, André Duvalier (Nicholson, qui se débrouille presque trop bien, vu le contexte), perdu dans une campagne prussienne qui ressemble fort au littoral californien (pour cause), et "se retrouve malgré lui l'hôte indésirable du Baron Von Leppe (Karloff), lequel va tenter de lui dissimuler l'horrible vérité qu'abritent les murs de son sinistre château", comme le résume si bien la jaquette ? Et bien ... précisément le charme désuet, assurément ringard, mais néanmoins authentique, de ces productions horrifiques. Charme auquel participent précisément les incohérences de montage ou la platitude des dialogues, et d'où surgissent toujours, quand on s'y attend le moins, un plan, voire une scène si l'on a de la chance, parfaitement aboutis et qui nous feront admettre, après coup, qu'il y a quand même deux ou trois bonnes choses à garder là-dedans !
   


               


  

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